Après Copenhague et son relatif échec, la Conférence des Parties (COP) de Cancùn devenait la prochaine étape où des décisions pour une réelle réduction des émissions de gaz à effet de serre pouvaient être prises. Les conférences intermédiaires ont rapidement forcé de revoir cette perspective à la baisse, et à la veille de Cancùn, l’espoir était bien faible que la réunion débouche sur quelque chose de concret.
Qu’en a-t-il été ? Cancùn, c’est un peu l’opposé de Copenhague. D’immenses espoirs avaient été placés dans la réunion de Copenhague, comme si un accord sur le diagnostic du réchauffement pouvait déboucher directement sur des mesures concrètes. Mais ces mesures mettent en cause d’énormes intérêts économiques et politiques, et la partie s’avérant très difficile, les discussions sur le communiqué final avaient eu lieu à huis-clos. Cancùn n’a pas attiré les mêmes foules, mais au cours du travail la transparence a été de règle et c’est en séance plénière qu’a été discuté et acclamé l’accord final ; Cancùn aura été essentiellement la démonstration que la négociation dans l’esprit onusien est toujours d’actualité. Il faut aussi saluer la position de l’Inde qui, malgré son opinion publique, a accepté l’idée de prendre des mesures contraignantes de réduction des émissions.
Qu’est-ce qui ressort concrètement de Cancùn ?
- La confirmation de l’objectif d’une limitation à 2° du réchauffement climatique pris à Copenhague, cette confirmation impliquant que les pays émergents s’engagent.
- Le projet de mise en place d’une procédure de « Contrôle et de vérification ». Les rapports d’action présentés par les pays seront analysés par des experts indépendants.
- La réaffirmation de la légitimité du protocole de Kyoto
- La création d’un « Fonds verts pour le climat » doté de 100 milliards de Dollars par an à partir de 2020 est actée ainsi que celle d’un mécanisme de transfert de technologies propres.
« Sauvons le Climat », regrette que l’urgence climatique ne semble pasencore avoir été prise à sa juste valeur. Depuis Copenhague et en attendant un accord sérieux sur la réduction des émissions de GES des dizaines de milliards de tonnes de CO2 vont venir durablement s’installer dans notre atmosphère, garantissant ainsi que la température de la planète va continuer à croître.
Faut-il attendre des accords incertains ou que la violence des événements climatiques se manifeste pour que les Etats osent prendre les décisions qui s’imposent et qui se résument, ne compliquons pas inutilement la donne, à remplacer les trois grandes énergies fossiles par des sources d’énergies décarbonnées ?
Faut-il, et au nom de quels intérêts, tarder à expliquer que ces sources d’énergies existent[1], qu’elles sont maitrisées et que certaines d’entre elles sont très compétitives ?
Faut-il renoncer à dire, bien qu’il soit possible d’économiser beaucoup l’énergie, que des investissements considérables vont devoir être consentis et que le prix de l’énergie s’en ressentira ? Qu’une hausse du prix de l’énergie est à la fois nécessaire, souhaitable et possible dans la mesure où des plans d’accompagnement seront mis en place pour les rendre socialement acceptables[2].
Certainement pas ! Et cela d’autant moins que ces mesures, si elles sont prises rapidement et rationnellement, n’entraineront ni décroissance ni modifications profondes de nos modes de vie.
Ce qui importe, et qui nous semble devoir être le premier acquis de Cancun avec le projet de mise en place d’une procédure de « Contrôle et de vérification », c’est d’instaurer des indicateurs économiques reconnus et incontournables[3].
Il faudra notamment se résoudre à admettre que si la pollution et la disparition des ressources ne sont pas comptabilisées et restent enregistrées comme des activités économiques favorables à la croissance, on n’aboutira à rien. Par contre, comptabiliser les destructions de ressources selon des normes uniformes changera à coup sûr l’aspect des choses.
Il est plus que temps que les discours laissent la place aux actes.
Le réchauffement climatique deviendra dramatique si l’on tarde à engager à grande échelle des actions concrètes et judicieusement conçues. A défaut, ce sera la génération des jeunes d’aujourd’hui qui se trouvera contrainte de réagir avec brutalité ce qui ne manquera pas de mettre en péril le développement et probablement la démocratie.
Alors, Cancùn, une réussite ? Le processus de négociations est préservé, quelques avancées timides ont été faites. L’espoir survit que cet esprit positif se prolonge, se développe et que des mesures enfin efficaces soient prises mais plus on attend, plus elles seront onéreuses, économiquement et socialement.
[1] Nucléaire, hydraulique, biomasse, éolien (dans la mesure où l’on apprend à en gérer la discontinuité), captage stockage du CO2. Voir scénario Negatep.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.