Philippe Hansen
c’est une cave pas « une poubelle » !
dimanche 26 mai 2013,
Dernières salves de l’obscurantisme
Maryse Arditi pour la FNE refuse le débat public sur le site de stockage souterrain CIGEO, comme Jean-Louis Basdevant avait refusé de débattre avec nous, l’an dernier : les antinucléaires ont peur de l’affrontement des idées. En revanche des militants anti-nucléaires manipulés ont déjà perturbé la première réunion sur ce projet. Il est étonnant que ces militants fassent si peu preuves d’esprit critique devant les mots d’ordre qu’on leur propose. En effet les solutions pour les déchets [1] se déduisent de quelques propriétés physiques aisément vérifiables : la composition du combustible usé, la chaine de désintégration, le rayonnement émis et les périodes radioactives.
Rendre à Gaïa, la radioactivité que nous lui avons prise.
Tout d’abord faire de l’énergie nucléaire, ce n’est pas créer de la radioactivité ex-nihilo. Même si ce ne sera plus cas avec les surgénérateurs, pour faire fonctionner une réacteur, il faut extraire de l’uranium quelque part et l’uranium naturel est faiblement radioactif. Il est donc raisonnable de comparer la radioactivité du site par rapport au niveau de radioactivité ou de radiotoxicité de la mine d’uranium : au bout de 10 000 ans, la radiotoxicité revient au niveau de la mine initial et 10 000 ou 100 000 ans, ce n’est pas une durée importante par rapport à la géologie, il ne s’agit même pas d’une ère glaciaire : à cette profondeur le charbon et le pétrole sont restés confinés des millions d’années.
Un stock de matière fissile pour
les générations futures
Si l’idée de « déchets dangereux pour des millions d’années » est déjà fausse, il probablement faux de dire qu’il s’agit de confiner les déchets pour des centaines de milliers d’années. En effet, observons les principaux radionucléides qui semblent poser problème.
Au début du stockage l’activité est dominée par le césium 137 et le strontium 90 qui sont ensemble, deux émetteurs béta-gamma de période 30 ans. En mille ans, leur réactivité a donc presque disparu : le rayonnement gamma est nettement plus faible. En effet, les actinides mineurs émettent peu de rayonnement gamma et celui-ci est d’énergie moindre. On peut donc s’approcher beaucoup plus facilement des colis mais il n’est pas encore temps d’aller les rechercher. La radiotoxicité est alors dominée par une cinquantaine de tonnes d’américium. L’américium se présente sous deux isotopes Am 241 et Am 243.
L’américium 241 se transforme en neptunium 237 fissile, mais il y a encore plus intéressant, l’autre isotope américium 243 se transforme avec une période 7300 ans en plutonium 239. Donc au bout de 30 000 ans, lorsque l’uranium minier aura probablement disparu, il restera l’uranium de l’eau de mer, le plutonium des réacteurs et le plutonium des sites de stockage. Si jamais on a arrêté le nucléaire, donc si on a plus de plutonium 239 et si on veut le redémarrer : nos descendants auront une source de matière fissile, l’allumette qui permet d’utiliser l’uranium 238. A cette date, l’enveloppe métallique des colis aura probablement disparu, mais le verre devrait être peu altéré, récupérer les verres permettrait de récupérer quelques dizaines de tonnes de plutonium, c’est ce que l’on retraite actuellement en France.
A long terme, le site devient une mine d’uranium, tout simplement
Plaçons nous maintenant au-delà de 100 000 ans : les verres ont probablement été dissous, une très faible élévation de radioactivité naturelle indique à nos descendants la présence d’iode 129 issu d’un site de stockage.N’oublions pas que les radionucléides se détectent avant que l’exposition constitue un danger. Il sera possible de retrouver les quelques kilomètres carrés d’argile dans lesquels l’uranium 235 issu du plutonium 239 aura été piégé, l’uranium 235 du stockage s’est mêlé à hauteur de 10% aux 3 grammes par tonne d’uranium naturel, on est donc en présence d’une mine d’une cinquantaine de tonnes d’uranium enrichi, l’équivalent de 100 Mtep, c’est à dire une année de production électrique.
Encore de la matière fissile et un métal rare en prime.
On pourra multiplier par trois la quantité d’énergie de la mine si on récupère le neptunium 237 en réacteur à neutrons rapides ou par passage par le plutonium 238. En prime, on peut récupérer une dizaine de tonnes de palladium, ne l’a pas déjà fait, car la production mondiale actuelle de palladium étant de 200 tonnes, la source n’est pas négligeable.
Conclusion
Brûler des énergies fossiles conduit à stocker des cendres, et si on veut stocker le CO2, c’est prendre le risque de fuites. Faire de la géothermie profonde, c’est stocker des sels qui précipitent à la surface ....Dans le cas d’un site de stockage géologique de déchets nucléaires, le premier problème après le confinement est la puissance thermique dégagée, ensuite la radioactivité gamma décroît dans les verres, à l’abri de la biosphère, puis les américiums se bonifient en produits fissiles manipulables.
Qui oserait dire que l’industrie nucléaire ne soucie pas des générations futures ?
Petite correction : le strontium 90 est un émetteur beta presque pur et le césium 137 un émetteur beta/gamma.
Rédigé par : Benjamin | 02 juin 2013 à 20h28