Le 20 septembre 2013, le Président de la République lançait la "Conférence environnementale pour la transitio nécologique et reprenait dans son discours l’essentiel des recommandations du rapport issu du débat public sur la transition énergétique. Or ces recommandations ont été largement critiquées et force est de constater qu’elles n’ont guère suscité l’adhésion, en particulier en raison de leur manque de réalisme économique et de solidité technique.
Le rapport de la Cour des comptes sur la politique de développement des énergies renouvelables[1] apporte un éclairage essentiel car c’est, à notre connaissance, le premier rapport officiel qui aborde sans détour la problématique de la gestion de l’intermittence et des conséquences de l’insertion de sources intermittentes dans le réseau électrique. Ce rapport présente en particulier des informations précieuses sur les véritables coûts des énergies renouvelables pour les consommateurs et la communauté, dont les citoyens sont peu informés.
La Cour des comptes, qui avait, en janvier 2012, présenté un rapport sur les coûts de la filière électronucléaire, a ainsi couvert deux des trois piliers de toute réflexion sur la politique énergétique du pays. Il serait donc essentiel qu’elle se saisisse en urgence, avant qu’une loi ne soit votée, en 2014, du troisième thème, l’efficacité énergétique.
En effet, une politique de l’énergie efficace du point de vue environnemental, mais également acceptable économiquement et socialement, ne peut être que progressive :
· utilisant au mieux nos atouts actuels, biomasse, hydraulique, nucléaire, énergies toutes déjà décarbonées,
· choisissant des investissements bénéficiant d’un temps de retour sur investissement acceptable, garants de nos capacités futures d’investissement,
· n’introduisant de nouvelles technologies qu’après s’être assuré de leur maturité et de leur compétitivité.
Or la politique actuelle et les orientations présentées par le Président, influencées par les propositions irréalistes de l’ADEME, ne répondent à aucun de ces critères. Choix de rénovations lourdes et massives de l’habitat existant, qu’on ne pourra financer, au détriment de rénovations efficaces, perte de repère sur les émissions de gaz à effet de serre avec une règle technique du bâtiment qui favorise l’usage du gaz, destruction de l’atout nucléaire au bénéfice d’énergies renouvelables intermittentes non maîtrisées, pauvreté des résultats dans le domaine de l’énergie chaleur (biomasse et pompes à chaleur par exemple), : la question de la transition semble engagée à l’envers et les recommandations de la Cour des Comptes sur les énergies renouvelables ne font que le confirmer. Que recommande-t-elle en particulier ?
· n°6 : Réserver les moyens de soutien aux installations les plus efficientes (coût, part dans la production énergétique et contenu en emplois) ;
· n°7 : redéployer les crédits au sein du fonds chaleur en faveur des filières les plus efficientes ;
· n°8 : revoir le principe du financement par le seul consommateur d’électricité des charges de soutien aux énergies renouvelables électriques ;
· n°4 : éviter les effets d’aubaine.
C’est, en substance, ce que l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologique (OPECST) recommande aussi dans son rapport du 6 juin 2013 :"On ne peut pas prendre des décisions qui engageraient l'avenir de notre pays sur des paris. Avant d'avancer dans le démantèlement de nos forces de production énergétique d'aujourd'hui, il faut vérifier que les promesses en matière d'économies d'énergie se réalisent, et que les ressources alternatives en énergies renouvelables opèrent la substitution attendue, à qualité de service équivalente, etsans plus aucune subvention».
"SLC ne peut qu’approuver pleinement cette vision, dépourvue de tout dogmatisme.
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[1] Cf. http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/La-politique-de-developpement-des-energies-renouvelables
Vous trouverez tous ces points développés dans l'étude de Jean-Pierre Pervès :La politique de développement des énergies renouvelables : Analyse du rapport de la Cour des Comptes (juillet 2013), sur le site de Sauvons Le Climat
Ce débat de comment optimiser la matrice multiparamétrique(fossile, nucléaire, intermittente)de l'énergie est sain et doit aboutir à son optimisation objective en termes de coût, d'efficacité et les effets néfastes pour le climat. Et cela dans un contexte global, si possible.
Rédigé par : M. Asghar | 21 octobre 2013 à 13h23
Je suis assez déçu de constater que votre étude laisse penser (p8) que la chaleur prélevée à l'extérieur par les PAC n'est pas considérée comme une EnR, alors même que les PACs sont reconnus par le SOeS (donc l'état) comme la 4e source d'EnR en France après le bois, l'hydroélectricité et les biocarburants et devant l'éolien notamment.
D'autre part, faire porter tous les maux du monde à la libéralisation du marché et aux interconnections avec l'Allemagne ne me semble que très partiel. Après tout, on peut libéraliser et interconnecter sans subventionner le solaire PV: rien d'impossible, il suffit de limiter la dépense au départ!
Reste que je suis d'accord avec l'idée qu'il faille investir là où c'est le plus efficace. Or comme le système électrique français est presque totalement décarbonné, le plus efficace est d'investir ailleurs, dans le chauffage et l'isolation par exemple. Ou alors dans des véhicules qui consomment moins.
Rédigé par : Proteos | 21 octobre 2013 à 20h59
Réponse à M. Proteos:
Je suis assez déçu de constater que votre étude laisse penser (p8) que la chaleur prélevée à l'extérieur par les PAC n'est pas considérée comme une EnR, alors même que les PACs sont reconnus par le SOeS (donc l'état) comme la 4e source d'EnR en France après le bois, l'hydroélectricité et les biocarburants et devant l'éolien notamment.
Réponse : dans les bâtiments basse consommation la pompe à chaleur (PAC) est considérée comme consommant de l’électricité « énergie primaire », soit trois fois l’énergie finale consommée réellement dans la PAC, ce qui lui est très défavorable, alors que l’électricité en France est très peu émettrice de CO2. Il serait normal que la chaleur prélevée sur l’air ou le sol par la PAC soit considérée comme apport renouvelable comme le sont les panneaux photovoltaïques ou les chauffe-eaux solaires : les PAC seraient alors considérées comme consommant la même énergie que le gaz tout en émettant 10 fois moins de CO2 : ce n’est pas le cas et il y a donc bien traitement de faveur pour un gaz qui est de plus importé. Ce choix de la RT 2012 est bien un choix simplement anti-électricité et anti-nucléaire.
'autre part, faire porter tous les maux du monde à la libéralisation du marché et aux interconnections avec l'Allemagne ne me semble que très partiel. Après tout, on peut libéraliser et interconnecter sans subventionner le solaire PV: rien d'impossible, il suffit de limiter la dépense au départ!
Réponse: une vraie libéralisation du marché ne peux s’appliquer quand une énergie a un traitement favorisé au-delà du raisonnable : obligation d’achat par le gestionnaire du réseau à des tarifs parfois démentiels (jusqu’à 600 €/MWh pour le solaire en 2010 et 300 aujourd’hui, 230 pour l’éolien marin - soit 4 à 10 fois le tarif du marché). De plus on doit l’acheter même quand on n’en a pas besoin, ce qui mets en difficulté les moyens de production pilotables qui sont essentiels pour la régularité de fourniture (près de 51 GW de capacité aurait été mises sous cocon ces 3 dernières années). Il ne s’agit pas de s’interdire une technologie émergente : mais il ne faut pas avantager une technologie mûre déraisonnablement, or l’éolien et le photovoltaïque le sont. Exemple : en Allemagne en 2012 les réseaux ont du débourser 20 milliards pour acheter l’électricité renouvelable qu’ils ont revendue 2,9 milliards : l’écart, soit 85 % du prix d’achat, est une taxe de support. En Espagne le déficit du secteur était de 29 milliards. Donc autoconsommation pourquoi pas, mais pas avec des aides de cette ampleur, sans obligation d’achat des surproductions et en donnant aux producteurs une responsabilité réelle, financière, dans la fourniture d’électricité quand il n’y a ni vent ni soleil (stockage ou autres moyens).
este que je suis d'accord avec l'idée qu'il faille investir là où c'est le plus efficace. Or comme le système électrique français est presque totalement décarbonné, le plus efficace est d'investir ailleurs, dans le chauffage et l'isolation par exemple. Ou alors dans des véhicules qui consomment moins.
Réponse: jout à fait d’accord. Les véhicules hybrides sont un bon exemple.
Jean-Pierre Pervès
Rédigé par : Jean-Pierre Pervès | 22 octobre 2013 à 10h14
Je reviens à la charge: p8 de votre document, il n'est pas question de la RT2012. Il est question du décompte des EnR dans la consommation française d'énergie. Je le redis, les PAC comptent. Il y a aussi une autre erreur: c'est que le décompte pour les fameux 23% est en énergie finale.
Que la RT2012 ne soit pas du tout basée sur les émissions de CO2 de chaque source d'néergie et donc vouée à l'échec ou à de médiocres résultats dans ce domaine, c'est vrai. Mais ce n'est pas du tout le sujet du rapport de la Cour des Comptes, ni du passage que je signalais.
Que les dépenses pour les EnR soient extrêmement élevées en Allemagne, c'est vrai. Mais nul besoin de libéraliser pour ça: il suffit de subventionner sans limite. Pour contrôler les subventions, il faut un système qui prévoit un plafond de dépenses. Et même dans un système non libéralisé, les exploitants de centrales au gaz seraient en difficulté aujourd'hui:
* l'appel suivant les coûts marginaux existe depuis bien longtemps
* ces centrales au gaz tournent peu, du fait de la concurrence du charbon, de la politique de subvention aux EnR et de la crise économique. Même dans un système avec une forte composante planifiée, il serait difficile de faire vivre ces installations en les payant à la production.
Rédigé par : Proteos | 24 octobre 2013 à 21h24
Réponse à Proteos
Si vous regardez la page 9 vous verrez que j'ai écrit:
"Ainsi cinq ans après le lancement du Grenelle de l’environnement les ENRs chaleur autres que la biomasse
restent secondaires (PAC 8,6 %, solaire 3 %, géothermie 0,9 %) : la technicité souvent insuffisante de la
profession a participé également à la modestie de ces résultats, un obstacle auquel n’ont pas été apporté
des correctifs".
J'indique donc bien que les PAC sont incluses dans les ENR. Par contre dans la conception de la RT 2012 je pense, sauf preuve du contraire, qu'elles n'interviennent dans le décompte du bilan énergétique qu'au titre de leur consommation d'électricité, et non au titre de leur bilan réel,la chaleur prélevée dans la nature devant venir en déduction du bilan. Il n'y a donc pas contradiction entre les deux informations.La Cour a traité surtout le coté économique, n'étant pas compétente sur le plan technique, ce qui n'est pas choquant.
Concernant vos autres commentaires ils ne sont pas éloignés des nôtres. il ne s'agit pas de défendre ou condamner le libéralisme mais d'estimer si la réglementation est cohérente avec le risque climatique. Elle ne l'est pas. Par ailleurs le recours au charbon nous gène tout autant.Nous ne sommes pas opposés à des aides ciblées quand l'avantage climatique est réel et que la technologie utilisée n'est pas anti-compétitive. Il faut évaluer et classer par ordre de mérite.
Rédigé par : jean-Pierre Pervès | 24 octobre 2013 à 22h58
Les bâtiments qui sont construits aujourd'hui seront encore là quand les centrales nucléaires françaises vieillissantes auront cessé de fonctionner. A plus de 100 euros le MWh des centrales neuves il est logique qu'on cherche quand même à préserver l'intérêt des générations actuelles. La vieille génération leur a laissé suffisamment de dettes comme ça...
Rédigé par : Redux | 26 octobre 2013 à 05h58