Claude Allègre vient de publier un nouveau livre, « L'imposture climatique, ou la fausse écologie », un pamphlet où il ressasse ses vieilles lunes déjà largement exposées dans ses ouvrages précédents et où il collectionne erreurs et contre-vérités. A tel point que dans les médias, souvent favorables au chercheur et ancien ministre, certains commencent à s’émouvoir sérieusement.
Le ton répétitif du livre, les attaques irraisonnées contre le GIEC, sont dénoncés dans un article des Echos (http://www.lesechos.fr/info/analyses/020383652677-le-climatosceptique-en-chef-perd-le-nord.htm). Les attaques infondées de Claude Allègre sur le GIEC et la conférence de Copenhague sont également pointées dans un article du blog de Libération (http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2010/02/all%C3%A8gre-d%C3%A9buggage-3-le-graphique-faux.html) qui relève aussi un certain nombre d’affirmations fausses sur l’évolution récente du climat. Particulièrement remarquable est la démonstration que la courbe sur laquelle s’appuient Vincent Courtillot et Claude Allègre pour affirmer l’effet prédominant du soleil sur l’évolution récente du climat est grossièrement fausse. Ils le savent depuis une séance à l’Académie des sciences en 2007, mais n’ont jamais répondu par écrit aux arguments scientifiques qui l’avaient montré.
Les erreurs, elles, sont nombreuses : le Monde en fait une liste non exhaustive (http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/02/27/le-cent-fautes-de-claude-allegre_1312167_3244.html), le blog de Libération également dans l’article cité ci-dessus, et aussi dans une réponse à Claude Allègre de Jean-Louis Fellous[1] (http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2010/02/jeanlouis-fellous-r%C3%A9pond-%C3%A0-claude-all%C3%A8gre.html), qui fustige confusions, contre-vérités et affirmations sans fondement de Claude Allègre :
- Erreur scientifique : prétendre que la difficulté de prévoir la météo à 10 jours empêche de prévoir le climat à long terme, c’est confondre météorologie et climatologie ; chacun sait qu’il fait plutôt chaud l’été et plutôt froid l’hiver, même s’il est difficile de prévoir le temps qu’il fera en Bretagne la semaine prochaine !.
- Contre-vérité : affirmer que les climatologues considèrent que le CO2 est la seule cause du changement climatique, alors ceux-ci incluent de plus en plus de facteurs dans leurs modèles : autres gaz à effet de serre, aérosols, soleil, couplage atmosphère-océan, couplage avec la biomasse.
- Affirmation sans fondement : affirmer que les climatologues négligent les autres problèmes auxquels les hommes doivent faire face, comme l’alimentation, l’accès à l’eau etc. En réalité, Claude Allègre sous-estime la gravité de ces questions, rendues plus aigues par le réchauffement climatique.
Et que penser du fait que Claude Allègre enrôle hardiment parmi ses supporters des personnes qui n’hésitent pas à dire qu’elles sont en désaccord avec lui ? Le blog de Libération y consacre un petit article (http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2010/02/all%C3%A8gre-d%C3%A9buggage-2-le-sergent-recruteur.html) ; outre les exemples donnés dans l’article signalé ci-dessus, le Monde dresse toute une liste de personnalités réelles ou imaginaires, scientifiques ou non (http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/02/27/la-liste-imaginaire-des-cautions-scientifiques-enrolees-par-l-ancien-ministre_1312168_3244.html), que Claude Allègre présente abusivement comme des scientifiques qui le cautionnent.
A la dernière émission (28 février 2010) de « C Politique », à la suite de la remarque de Jean Jouzel que le mois de Janvier 2010 a été un des plus chauds (le quatrième plus chaud) jamais mesuré, Claude Allègre commença à nier tout sens à la notion de température moyenne (alors qu’il en parle sans scrupule lorsqu’il s’agit de dire que la température n’augmente plus) puis il prit chacun à témoin que nous avions eu plutôt froid en janvier. Il oubliait que dans l’hémisphère Sud janvier est le plein été… Où est la rigueur scientifique ?
Claude Allègre nie le rôle du CO2 émis par l’homme sur le climat. Mais il recommande tout de même d’en limiter drastiquement les émissions. D’une part pour économiser les ressources fossiles, d’autre part pour une raison qui préoccupe aussi beaucoup les climatologues : le CO2 accumulé dans l’atmosphère produit une acidification de la mer qui peut nuire gravement à sa faune et avoir des conséquences graves pour l’environnement et les populations côtières. Est-ce une raison pour aligner tant de contre-vérités sur l’effet des gaz à effet de serre sur le climat ?
Que l’on veuille s’opposer aux visions apocalyptiques développées par certains courants écologistes à partir de certains résultats scientifiques mal compris, c’est une chose. Mais ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain. S’opposer aux peurs, cela ne peut se faire qu’en propageant une approche rationnelle du monde, et non par le dénigrement poujadiste du travail d’une communauté scientifique.
Les quelques « non-événements » montés en épingle autour et à la suite de la conférence de Copenhague (dont la fameuse coquille concernant la fonte des glaciers de l’Himalaya) ne doivent pas entamer les efforts remarquables que la communauté des climatologues ont déployés depuis plus de 20 ans pour mettre à disposition du public général les résultats publiés par l’ensemble des chercheurs du domaine (rappelons encore une fois que le GIEC n’est pas un organisme de recherche). Ces résultats sont nuancés, pondérés par l’attribution de probabilités reflétant les incertitudes attachées aux divers phénomènes en jeu, ils ne ressemblent en rien à la caricature que les « climato-sceptiques » cherchent à installer auprès de l’opinion à coups d’arguments d’autorité non fondés. On souhaiterait que d’autres communautés de scientifiques parviennent à alimenter le débat public en présentant ainsi une synthèse des connaissances d’une période. Quant au bilan de la conférence de Copenhague, il est double : d’une part, la présence des principaux chefs d’état de la planète – une première !- a validé la nature globale des problèmes ; d’autre part, l’absence de tout engagement chiffré des états a fait apparaitre que les solutions ne sont pas de nature technique, mais politique, et que les équipes politiques, constituées sur le court terme, ne sont pas encore prêtes à envisager sérieusement le long terme. Faut-il s’en réjouir, comme le fait Claude Allègre ?
[1] Ancien responsable des programmes d'observation de la Terre par satellites au Cnes et ancien directeur des recherches océaniques de l’Ifremer.
Monsieur Claude Allègre a raison et tout ceux qui vont s'en mettre plein les poches ont du souci à se faire.
pour ma part je me désinscrit immédiatement de SLC
Cordialement.
Rédigé par : M. Thouard | 05 mars 2010 à 15h20
Claude Allègre fait des adeptes: les créationnistes étatsuniens demandent que le réchauffement climatique ne soit plus enseigné.
Au second degré, c'est une reconnaissance de l'action de l'Homme...
Rédigé par : P.A.Tulle | 05 mars 2010 à 17h58
En novembre 2009 l'Académie des sciences a mis en ligne "Libres points de vue d'Académiciens sur l'environnement et le développement durable". Claude Allègre ne s'y exprime pas (hasard?), mais Vincent Courtillot est présent dans un groupe qui défend l'idée de la corrélation entre activité solaire et réchauffement climatique. Seulement voilà les autres (nombreux) points de vues se rejoignent dans la mise en évidence de l'importance primordiale du facteur anthropique. À lire!
Rédigé par : D. jacquiot | 06 mars 2010 à 11h53
Au second degré, c'est une reconnaissance de l'action de l'Homme...
Pluss que ça ! A mon avis les deux dogmes :
"Menschen über alles"
"La terre appartient à l'homme"
sont des moteurs inconscients des climato-sceptiques.
Le plus cocace c'est que ces gens là , généralement , ne sont plus catholiques ...mais ont gardé les dogmes.
Alors que je suis persuadé qu'une majorité de prêtres français sont sensibles au réchauffement climatique et à la finitude des ressources naturelles.
Rédigé par : CA | 11 mars 2010 à 19h56
Bonjour,
Ci-dessous un lien vers le blog où j’ai publié un texte dans lequel j’explique pour quelles raisons, moi qui suis un Français moyen, j’estime qu’il est plus raisonnable de faire confiance au GIEC plutôt qu’aux climatosceptiques
http://bruno-b.blogspot.com/2010/03/claude-allegre-ou-de-lart-de-se-tirer.html
Rédigé par : Christophe BOMBLED | 20 mars 2010 à 10h01
Mais quelle mouche pique Sauvons le Climat ?
Je suis signataire du manifeste de Sauvons le Climat. J'en suis (encore) adhérent. Je fus même membre du conseil d'administration.
Je suis en profond désaccord avec le fond et la forme de ce communiqué. Je ne crains pas de dire que si j'avais imaginé que le collectif Sauvons le Climat était capable de s'abaisser à ce niveau de communication jamais je n'aurais envisagé de signer son manifeste, d'adhérer à l'association ou de me présenter à l'élection de son CA...
Ce communiqué m'apparaît délirant.
Dès son introduction on apprend que les médias seraient d'ordinaire favorables au chercheur et ancien ministre... mais, mes amis, vous vivez dans quel monde ? Je ne vous ferai pas l'insulte de penser que vous rêviez d'un monde dans lequel Claude Allègre n'aurait plus le droit de publier un livre...
Vous affirmez ensuite que dans les médias "certains commencent à s'émouvoir sérieusement"... et qui citez-vous ensuite (sans les nommer)... Stéphane Foucart (Le Monde) et Sylvestre Huet (Libération), militants écologistes connus qui se sont faits depuis longtemps les spécialistes des dénonciations les plus haineuses de Claude Allègre. Ils ne commencent qu'à s'émouvoir ? A qui peut-on faire croire cela ?
Et puis, mes amis, comment peut-on sérieusement oser s'exprimer ès qualité de la science en marche en s'abritant d'abord derrière des journalistes puis en osant affirmer "Claude Allègre nie le rôle du CO2 émis par l'homme sur le climat"... Soucieux d'instruire sur la base des faits j'ai attendu de lire "l'imposture climatique", ce que j'ai commencé à faire hier, et je n'ai pas besoin d'avoir lu beaucoup de dizaines de pages pour pouvoir déjà affirmer que cette affirmation est fausse, factuellement fausse !
Ceux qui me connaissent (et m'auront reconnu dans ce commentaire) savent que j'ai l'habitude de dire que j'incline à penser qu'Allègre a scientifiquement tort mais que je considère qu'il a politiquement raison.
Sauvons le Climat ne sort pas grandi avec ce communiqué. Il mêle sa voix aux journalistes haineux habituels pour dénoncer Claude Allègre, reprend à son compte de façon acritique le portrait de Claude Allègre en "négationniste" de l'effet de serre que les militants de la cause écologiste lui dressent, et utilise une langue de bois étonnante sur ce qu'il qualifie de "non évènements" pour se placer en quelque sorte comme porte-parole officieux du GIEC...
A le relire, ce communiqué ne semble avoir qu'un seul objectif : dénigrer Claude Allègre.
Et bien, chers amis, je ne suis pas à Sauvons le Climat pour soutenir le GIEC. Je considère que l'initiative de mêler dans une seule agence sous une seule dénomination un cercle d'expertise scientifique (dont l'objet est de dresser l'état des savoirs et des incertitudes sur le climat : quelles observations peuvent être faites), avec un second cercle se livrant à de la prospective (on change de registre...), avec enfin un troisième cercle faisant des recommandations politiques (on a changé définitivement de registre...) est une TRES mauvaise idée. Cela génère dans l'esprit du public (et des médias et des décideurs) la confusion la plus extrême. Je note d'ailleurs que "comme tout le monde" le communiqué de Sauvons le Climat parle "du GIEC" mêlant dans une même bouillie communicative les scientifiques du premier cercle, les prévisionnistes du second, et les politiques du troisième... Ce n'est pas pour rien que le GIEC a reçu le prix Nobel... de la paix... ce qui n'a absolument rien de scientifique mais contribue encore un peu plus à la confusion (faut-il en rire ou en pleurer quand on voit certains scientifiques de talent accoler leur "prix Nobel" de la paix à leurs titres scientifiques ?). Qui plus est cette aspiration à une gouvernance mondiale dont "le GIEC" serait en quelque sorte le précurseur m'est particulièrement (politiquement) détestable...
Alors chers amis, quelle mouche vous a piqué pour mêler votre voix d'ordinaire si raisonnable à celle, habituellement haineuse, des journalistes militants de la cause écologiste ?
Rédigé par : Daniel | 21 mars 2010 à 06h11
Bonjour ,
Claude Allègre est plus convaiquant que vous ! Il cite ses sources scientifiques et non journalistiques.
Pour ma part, qui ai fait un peu trop confiance à tout cela, je vais me mettre à lire les sources scientifiques de l'édifice. Et j'espère que j'y trouverai les preuves de la mesure correcte des courbes de température.
J'espère aussi très franchement que tout le monde garde bien à l'esprit le caractère très peu fiable de toutes nos prévisions - fussent-elles scientifiques -lorsqu'elles concernent le futur à long terme ...
Pour le moins, j'aurais préféré que SLC fasse une critique
du livre d'Allègre en s'appuyant plus sur la science et en essayant de souligner les points de convergence sur les effets potentiellement dangereux de l'augmentation accélérée du CO2 dans l'atmosphère et les océans. À moins que cela ne soit pas possible, et là ce serait très, très grave.
Johann
Rédigé par : Johann | 31 mars 2010 à 10h13
Johann,
une analyse complète, sérieuse, d'un livre, ça demande du temps. Il faut être convaincu de l'utilité d'une telle tâche pour s'y lancer.
Un des propos du commentaire de SLC, c'est de montrer que le caractère scientifique (rigueur, objectivité) du livre de Claude Allègre est illusoire : il cite des sources, mais sont-elles réelles, et ce qu'il dit est-il conforme à ses sources ?
Des journalistes ont fait un travail d'investigation, il serait malhonnête de ne pas leur en donner le crédit.
Quand on souhaite acquérir ou enrichir ses connaissances sur un sujet, il faut s'assurer de la fiabilité des sources (livresques, internet, journaux ...) qu'on va consulter. Pour s'en assurer, on cherche si, dans ce qu'on peut facilement vérifier, l'information est correcte ou altérée. En l'occurrence, le taux d'erreurs facilement contrôlables (les sources sont données), relevées par les journalistes et autres commentateurs, témoigne d'un manque de rigueur dans ce livre de Claude Allègre et jette le doute sur l'objectivité de ses propos.
S'appuyer sur la science, sur l'ensemble de la science publiée, c'est ce que font les chercheurs qui consacrent une partie de leur temps à la rédaction des rapports du GIEC. Si vous cherchez les sources, les très nombreuses publications sont référencées dans les publications et rapports du GIEC sur le site : http://www.ipcc.ch/ (en anglais comme la très grosse majorité de la littérature scientifique). Les courbes de températures peuvent être trouvées sur Les sites des institutions qui les déterminent : http://data.giss.nasa.gov/gistemp/graphs/ (NASA, USA), http://www.ncdc.noaa.gov/cmb-faq/anomalies.html (NOAA, USA), http://www.cru.uea.ac.uk/cru/info/warming/ (East Anglia, GB). Les températures récentes sont données avec toutes leurs sources dans http://en.wikipedia.org/wiki/File:Satellite_Temperatures.png
JP
Rédigé par : jp | 31 mars 2010 à 11h00
Le communiqué et le mémoire adressé à la ministre de la Recherche par 400 scientifiques apportent une réponse claire à ceux qui trouvent que Allègre a une démarche de scientifique et pas les journalistes qui ont fait le travail de base qui fut de vérifier les assertions de l'ex-ministre. A la lecture des réactions furieuses ci-dessus postées, on comprend le mal qu'Allègre fait. Mais j'avoue ne toujours pas comprendre les raisons d'un tel déni.
Rédigé par : Ivan Théry | 01 avril 2010 à 21h56