Sauvons le Climat est très préoccupé par le piètre résultat des négociations de Durban, qui ont une nouvelle fois montré combien il sera difficile de limiter l’augmentation de la température moyenne du globe à + 2°C en 2050, valeur au-delà desquelles de nombreux scientifiques craignent un effet d’emballement.
Comme on le sait la production d’électricité est, au niveau mondial, responsable de plus de 40 % des émissions de CO2 et sa consommation va croitre en raison de l’augmentation de la population, de la hausse des niveaux de vie et parce qu’elle est le vecteur énergétique dont les usages ne cessent de se multiplier.
L’électricité est également le vecteur énergétique qui permet le développement de certaines énergies renouvelables et leur transport jusqu’aux usagers, bien que l’intermittence de ces énergies en limite souvent le potentiel1.
Le recours accru au gaz et au charbon n’est donc pas une vue de l’esprit. C’est très exactement ce que nous observons aujourd’hui en Allemagne où, malgré un effort puissant dans les énergies renouvelables, quelque 13 GW de centrales brûlant essentiellement du charbon ou du lignite sont en cours de démarrage ou de construction et 10 centrales à gaz supplémentaires sont programmées.
Si l’on sait que produire 1 TWh avec une centrale au charbon moderne nécessite autour de 300 000 tonnes de charbon de bonne qualité et produit 1 million de tonnes de CO2, (et que bien souvent ces 300 000 tonnes de charbon doivent être transportées, ce qui nécessite 150 trains de 80 wagons de 25 tonnes) on imagine ce que nécessitera le remplacement des 140 TWh produits jusqu’il y a peu par leur nucléaire ! On peut facilement déduire de la situation Allemande qu’elle fera appel à 40 TWh supplémentaire d’énergies renouvelables, 50 TWh de gaz et 50 TWh de charbon et de lignite (charbon de mauvaise qualité, son pouvoir calorifique est beaucoup plus faible). Mais l’Allemagne vit sur un « matelas » de lignite et préfère exploiter ses propres ressources.
Ce que l’on sait moins c’est que la combustion du charbon (et pire encore du lignite) rejette quantité de produits hautement nocifs pour l’environnement et la santé.
- L’essentiel est de la silice (ou des carbonates) : les meilleurs dépoussiéreurs électrostatiques laissent encore passer 1 % de particules. Ce sont les plus fines et les plus néfastes pour la santé.
- Les oxydes d’azote : les dénitrificateurs ont un rendement médiocre et les rejets restent importants donnant de l‘acide nitrique, de l’ozone et des nitrates.
- Le soufre : les désulfureurs ont de meilleurs rendements mais laissent cependant passer des oxydes de soufre donnant de l’acide sulfurique et des sulfates.
- Le mercure : il est vaporisé et se mêle à l’humidité de l’air pour retomber sous la forme de composés mercuriels très nocifs pour la santé humaine et les enfants à naître.
- Le phosphore : il suit la même voie et donne de l’acide phosphorique et des phosphates,
- L’arsenic, le cortège des halogènes (chlore, fluor, brome, iode), le cadmium qui vont suivre plus ou moins la voie du mercure.
- L’uranium et ses descendants à longue durée de vie tels que le radium 226, le polonium 210 et le plomb qui est l’élément stable qui clôture la chaîne de désintégration ainsi que le thorium. L’uranium a la particularité d’avoir un point de fusion élevé et se retrouvera dans les cendres de foyers qui sont rejetés sur le parc à cendres.
- Le radon qui est déjà sous forme de gaz.
Tous ces produits bien que n’apparaissant qu’à l’état de traces finissent par représenter de grandes quantités. Si, par exemple, nous prenons 0,1 g de mercure pour 1 tonne de charbon, la combustion de 15 millions de tonnes par an donnera un rejet de 1 500 kg de mercure et de fait, nous retrouvons déjà des composés mercuriels dans l’eau des lacs de haute altitude.
On pourrait faire le même calcul pour tous les autres polluants passant par la cheminée des centrales et nous verrions que la pollution atmosphérique est considérable et aura des effets à long terme sur les populations. Ces effets sont bien plus problématiques que ceux des produits radioactifs des centrales nucléaires qui sont confinés en fonctionnement normal, et n'apparaissent que dans des situations accidentelles.
Face une telle réalité on ne peut que s’étonner que l’Union Européenne, si prompte à vouloir donner des leçons d’écologie au monde, ne se fasse remarquer que par son quasi silence2. Il est vrai que les décisions allemandes ne vont pas faciliter la mise en place d’une Europe de l’énergie et que l’approche intergouvernementale étant depuis quelques années préférée à la « méthode communautaire », la Commission est soumise à la pression de l’Etat dominant…
On peut également s’étonner que le petit monde des « Verts » soit lui aussi resté bien discret.
Quoiqu’il en soit on ne peut considérer qu’aujourd’hui l’Allemagne soit, en matière énergétique, le modèle à suivre.
Références.
- Michel Deshayes - Mines et énergie en Allemagne
- www.asn.fr/index.../RNTR_P1_CH1_depots_cendre_de_charbon.pdf
- sfp.in2p3.fr/Debat/debat_energie/websfp/LE%20CHARBON.htm
- SHORT COURSE A - Health Impacts of Coal: Robert B. Finkelman Joseph E. Bunnell
- www.davidsuzuki.org/fr/champs.../enjeux-et.../le-charbon/ - Canada
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1 On estime généralement que les réseaux électrique ne peuvent supporter plus de 15 % de leur capacité en énergies discontinues, ce qui implique pour des puissances excédant ce chiffre, la mise en place d’un quasi doublement de ces sources par des installations susceptibles d’être très rapidement mobilisées ce qui entraine un énorme surcroit d’investissement en centrales et réseaux de transport de l’électricité. S’agissant essentiellement de centrales brulant des carburants fossiles il est évident que si, comme ce serait le cas en France, le couple renouvelables / centrales thermique venait remplacer des centrales nucléaires, les rejets de CO2 s’en trouveraient augmentés…
2 Pour la première fois, l'Agence européenne pour l'environnement vient d’évaluer en termes monétaires les dommages que les sites charbonniers engendrent, via la pollution (frais de santé, baisse de la production agricole, etc.). Montant global de 102 milliards à 169 milliards d'euros par an. Compte tenu de la puissance de son industrie et de son utilisation de lignite, l'Allemagne est le pays européen dont les usines provoquent la pollution de l'air la plus coûteuse en termes absolus
La position d'Allemagne est de courte portée et elle ne la pourrait tenir à long terme comme dans les autres cas bien connus.
Rédigé par : M. Asghar | 14 janvier 2012 à 16h07
Jean Ferrat chantait le choix du fusil et du taureau pour mourir.
Aujourd'hui c'est mourir de chaud et de soif ou contaminé et irradié.
Laissez moi au moins choisir !
Rédigé par : Michel GUERITTE | 14 janvier 2012 à 16h56
J'ai fait le pari (une caisse)avec nombre de pélerins de mon entourage que les allemands ne suivront pas ce programme déconnant.
Itou, j'ai écrit à François Hollande (2 X)-pour qui je ne voterai pas, (moi qui fut actif dans un GSE de 74 à 2002 !!)-, comme au PS, que je suis absolument certain que son BSP (bon sens paysan)l'emporterait de tte façon. Les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent ! Même si le nuke ne sauvera pas la planète qui va droit dans le mur, il retardera un tout petit peu les conséquences des GES ; pm : une centrale au charbon presque par jour dans le monde !
Bonjour aux amis de sauvonsleclimat qui m'auront reconnu - Grantébé
Rédigé par : Jean-Pierre Genin - Ex EdF et Ing. Con. en Energie depuis 11 ans ( / retraite) | 14 janvier 2012 à 17h05
Article très intéressant où on apprend que le CO 2 n'est pas le seul rejet toxique des centrales à flamme.
Il existe une association allemande de défense et illustration de l'énergie nucléaire fondée par quelques ingénieurs du mode de production dernier cri d'électricité. Connaissez vous cette association?
Bien cordialement.
Rédigé par : Saint Germès Thierry | 14 janvier 2012 à 20h29
Dommage que les liens en bas d'article ne marchent pas.
L'enquête de l'EEA est assez significative, parmi les 20 premières installations les plus polluantes (à équivalent monétaire), il y a 20 centrales au charbon.
http://www.eea.europa.eu/pressroom/newsreleases/industrial-air-pollution-cost-europe
Cela dit, il manque à cet article une dose de cynisme. Finalement, les hommes politiques se sont bien rendus compte qu'aucune centrale au charbon n'avait entraîné d'évacuation de la population environnante à long terme. D'accord, il y a sans nul doute des morts, mais ce sont, en Europe du moins, des morts "statistiques" pour lesquels on est bien en peine d'en pointer un et de dire "celui-là est mort à cause du charbon". C'est encore plus vrai en France, où l'exploitation du charbon est arrêtée depuis plus de 20 ans et où les quantités consommées ont énormément diminué depuis qu'on a des centrales nucléaires. Bref, les dommages du charbon, c'est bien loin maintenant. Et l'avantage des morts par rapport aux évacués, c'est qu'ils ne protestent pas.
Rédigé par : Proteos | 14 janvier 2012 à 21h01
De toutes façons le BSP de François Hollande sera fonction des voies de Mme JOLY.
Donc il est facile de parier sur son évolution, qui ira peut etre même à l'encontre de la Direction d'EDF fermement décidée à fermer FESSENHEIM.
Ce n'est pas en cassant les qqs outils de production qui nous restent qu'on redressera la FRANCE.
@ Grantébé : à s'éloigner de St Joseph on finit par tomber dans la marmite du diable
Rédigé par : ABI | 15 janvier 2012 à 21h32
@ABI : Vous pouvez sourcer l'affirmation comme quoi la direction d'EDF est décidée à fermer FESSENHEIM ? Il y a quelques rumeurs comme quoi la fermeture ne l’embêterait pas autant que cela, mais d'ici à dire qu'elle souhaite fermer ...
Si "Sauvons le Climat" a quelques sources sur la quantité de ces divers polluants en fonctions du type de charbon, seulement 0,1 g de mercure pour 1 tonne, cela semble plutôt optimiste.
J'ai vu passer des chiffres nettement supérieurs à la ppm pour le thorium et l'uranium, ce qui, si confirmé, une fois multiplié par le nombre de tonnes consommées conduit à un résultat étonnant sur la quantité de déchets radioactifs à longue durée de vie produits par une centrale au charbon face à une centrale nucléaire de puissance équivalente. Voir ceci particulièrement : http://www.cejournal.net/?p=410#comment-207
Rédigé par : jmdesp | 16 janvier 2012 à 16h34
@ jmdesp
C'est le genre d'affirmation difficile à sourcer et à la relecture je m'aperçois que mon commentaire extrapole...
... trois informations que je pense aller dans le sens indiqué:
- le traitement de FESSENHEIM par l'ASN qui exige des travaux particulièrement difficiles et coûteux. Sans qu'il n'y ait quelconque collusion entre l'ASN et EDF il y a nécessairement des échanges et l'ASN peut frapper fort sur une Centrale vouée à l'arrêt.
- le vote à l'unanimité moins une abstention du Conseil Municipal de Strabourg contre FESSENHEIM. Or ÉS filiale d'EDF a toujours eu une importance significative à STRASBOURG.
- enfin l'inquiétude particulière des Syndicats de Fessenheim.
Rédigé par : ABI | 16 janvier 2012 à 19h46
@ABI : OK, merci de l'effort pour dépasser la simple rumeur.
Financièrement, cela reste surprenant, il faudra bien arrêter Fessenheim un jour, mais juste une année d'utilisation supplémentaire d'une centrale déjà amortie, il faudrait faire le calcul mais le CA réalisé se compte probablement en milliard, et le coût est à peine inférieur si on l'arrête. Ca relativise quand même beaucoup le coût des travaux même s'il est important.
De plus après les arrêts brutaux des allemands, on est déjà en forte tension sur les capacités de production, ainsi que sur le prix du gaz/fioul.
Ca ne pourrait guère s'imaginer que dans le cadre d'un coup politique, fermer Fessenheim en sachant que le moment est très mal choisi, et ensuite exploiter au maximum le coût financier induit pour démontrer que la fermeture des centrales est une très mauvaise idée, à ne surtout pas refaire.
Rédigé par : jmdesp | 17 janvier 2012 à 11h00